dimanche 2 octobre 2011

On ne change pas vraiment

Le pessimiste se plaint du vent, l'optimiste espère qu'il va changer, le réaliste ajuste ses voiles.[William Arthur Ward]
Je ne vous dirai pas : changez de caractère ; Car on n'en change point, je ne le sais que trop. Chassez le naturel, il revient au galop.[Destouches]
Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s'adaptent le mieux aux changements.[Charles Darwin]
Le 12 août dernier, j'avais écrit un billet qui s'intitulait tout simplement: changer. Je constate que j'en avais écrit un il n'y a pas si longtemps qui s'intitulait: qu'est-ce qu'on attend pour changer?

Et voilà que maintenant, la lecture des commentaires suite à mon dernier billet me rappelle qu'on ne change pas vraiment. Zed me parlait de ma façon d'écrire mes billets. Et j'ai réalisé que je le faisais déjà à l'âge de 13 ans. Impossible? Vous pensez que je veux me rajeunir en laissant croire que les blogues existaient lorsque j'avais 13 ans?

Le mot de Zed m'a rappelé un phénomène que j'avais presque oublié. C'était en 1957, l'année du décès de ma soeur Nicole. J'aurais toutes les raisons du monde de retenir de cette période comme une époque triste et malheureuse. Et pourtant, j'y pense avec nostalgie. Ma tante Jacqueline est venue habiter avec nous, avec ma mère en 1958. Elle a été également pensionnaire chez les religieuses pendant son cours d'infirmière. Elle en parle comme la plus belle période de sa vie.

J'étais pensionnaire, en 1957, dans un établissement qui n'existe malheureusement plus: le patro de St-Hyacinthe. L'endroit était superbe. Il était tenu par les frères et les pères St-Vincent de Paul dans un ancien château légué par le seigneur fondateur de St-Hyacinthe. Tout a été détruit pour faire face à du béton horrible: des HLM sans âme.

L'endroit habitait des pensionnaires. Mais c'était aussi une centre culturel et sportif qui pouvaient accueillir, en externe, plusieurs adolescents de la ville qui comptait environ 30 000 habitants à l'époque. On pouvait pratiquer une foule d'activités les plus diverses selon ses goûts et ses talents.

On pouvait pratiquer du hockey en hiver, du baseball en été. Ce qu'il y avait de merveilleux, c'est que la compétition n'était pas le principal mobile. On jouait pour le plaisir. On ne se promenait pas d'une ville à l'autre. Si on voulait jouer au hockey par exemple, le frère Durocher nommait deux capitaines. Chacun se choisissait un joueur à tour de rôle. À la fin de la partie, il y a avait un vainqueur. Et le lendemain, on recommençait le même stratagème comme si la partie de la veille n'avait jamais existée.

Mon frère Michel, en costume de parade,
au Patro de St-Hyacinthe

On pouvait jouer au tennis sur table, au billard, au ballon volant, au ballon chasseur et à bien d'autres choses encore. Certains jouaient même au docteur.

On pouvait apprendre la musique. Chaque Patro avait un corps de tambours et trompettes. Mon frère Michel en faisait d'ailleurs partie. Chaque année, il y avait une grande parade à Québec ou ailleurs où les différents corps de clairon se faisaient compétition. Il en faut toujours un peu. Une fois par année, c'est pas un péché.

On pouvait lire. Il y avait là une bibliothèque fort bien garnie où l'on pouvait emprunter des livres et lire sur place. Il y avait plusieurs collections de livres dont la collection complète des livres de Tintin. On faisaient la présentations de films, de très bons films.


Les frères aimaient tout particulièrement nous présenter des films d'Errol Flynn qui avait pourtant une vie privée très loin de la moralité chrétienne. L'Aigle des mers m'avait tout particulièrement amusé. On peut d'ailleurs en voir un extrait sur le lien qui précède. C'est fou de voir tout ce que la technologie permet de voir de nos jours. J'avais également été impressionné par le film Michel Strogoff, le roi des Tartares, avec Curd Jurgens.

Il y avait des messes, des sessions de confessions, des vêpres, des récitations de chapelet et bien d'autres choses tout aussi amusantes. Mais le clou de la soirée, c'était sans contredit les histoires du frère Durocher. Il a avait des collections de livre de Tintin et autres volumes de bandes dessinées présenté sur écran avec toutes les images du livre. Plusieurs Frères que j'ai connus étaient de véritables conteurs, bien avant Fred Pellerin.

Personnellement, j'aurais pu privilégier n'importe quelle activité. J'en ai choisi une qui était dan ma nature et la développer: écrire des billets avec des idées et des images. Évidemment, il n'y avait pas d'ordinateur en 1957. Mais il y avait au mur un babillard où les frères affichaient des textes de toute nature. J'avais suggéré et obtenu d'y avoir une chronique hebdomadaire. Je regardais des revues, comme par exemple Le Time Magazine. Je découpais des images qui me fascinaient et je m'organisais pour broder un texte susceptible de justifier et mettre en valeur la présence des images que j'avais choisies. S'il n'y avait pas de liens, j'en trouvais. C'était mon plaisir.

Je crois qu'on est très tôt ce que l'on est appelé à devenir. Et on ne change pas vraiment. On ne change pas sa nature. On s'adapte. On ne peut que mieux se connaître mettre en valeur ce qu'on a de mieux et composer le mieux possible avec ses faiblesses. On en tous un peu beaucoup des deux. On a les défauts de ses qualités et les qualités de ses défauts. Les reconnaître, c'est beaucoup. S'en accommoder, c'est le défi de toute une vie.


Il m'est arrivé souvent de vivre des difficultés que j'essayais de voir comme la conséquence de quelque chose ou quelqu'un. Avec les années, je me suis aperçu que ces problèmes me suivaient partout. Le contexte avait beau changer radicalement, je ne changeais pas. Et je crois que nous sommes tous ainsi. Non, on ne change pas sa nature. Et on peut encore moins changer les autres. Un narcissique sera toujours un narcissique. Vivre en société, c'est avant tout, je crois, savoir s'adapter et posséder l'art du compromis.

samedi 17 septembre 2011

L'amour, la vie, la mort

Photo La Presse

La mort, ça fait partie de la vie. L'amour la fait naître. La mort en est le point culminant. C'est le moment où l'on prend le plus conscience de la force de l'amour qui nous unit à quelqu'un. On regrette souvent de ne pas en avoir pris suffisamment la mesure avant. La mort de Jack Layton m'a donné une nouvelle occasion de me le rappeler. Tous les superlatifs entendus frôlaient presque la démesure, même si l'homme les méritait bien. C'est comme si l'on voulait rattraper le temps perdu.

On dit souvent que la mort est l'occasion de réaliser tout ce qu'on aurait aimé dire ou faire pour quelqu'un qu'on aime
Dans le cas de l'artiste de renommée internationale Alain Lefevre, il est évident que ce n'est pas le cas. Presque chaque phrase prononcée (dans une entrevue récente) était l'occasion de dire son amour pour sa compagne Jojo. Et il a cité Christopher Reeves, le héro qui incarnait Superman au cinéma.

On a le droit de partir avec celle qu'on aime (Christopher Reeves)

Cette citation reprise par Alain Lefevre dans l'émission On prend toujours un train pour la vie a quelque chose de troublant.

Il disait le plus sérieusement du monde qu'il n'envisageait pas d'autres solutions que de mourir en même temps que l'être qu'il aimait si elle venait à mourir.

Quand on a demandé à Alain Lefevre s'il avait trouvé pénible la mort de ses parents, il a répondu bien candidement: Mais non. J'avais Jojo.

Si vous avez manqué l'émission, vous pouvez la voir sur le lien suivant: http://www.tou.tv/on-prend-toujours-un-train-pour-la-vie/s2011e14 Pour ce faire vous devrez subir 2 commerciaux et écouter l'entrevue avec Louise Deschatelais. Sinon, vous pouvez au moins voir au début un cours extrait des deux entrevues. Son cas est unique. Il ne pourra jamais se reprocher de ne pas lui avoir assez dit Je t'aime.

On dit souvent que la mort est l'occasion de réaliser tout ce qu'on aurait aimé dire ou faire pour quelqu'un qu'on aime
Mais il existe un phénomène fort étrange: un être dont la mort est imminente trouve parfois des forces surprenantes pour attendre longtemps quelqu'un avec qui il y a des choses non réglées. c'est comme s'il s'accrochait à la vie pour avoir l'occasion d'entendre ce qu'il n'avait pas pu entendre ou dire ce qu'il n'avait pas pu dire avant. J'ai pu le vivre à la mort de mon père.

Je n'ai pas beaucoup de souvenirs de mon père. Le jour de mon mariage, il était présent. Mais c'est presque un hasard. Il avait été tellement d'années sans donner de nouvelles. À la fin de mes études collégiales, j'étais particulièrement anxieux de savoir s'il était toujours vivant ou dans des conditions de vie pénibles.

Après mon mariage, je le voyais rarement. Il demeurait très loin, à Thurso. C'est là que je suis allé le voir rapidement en ayant appris qu'il était atteint d'un cancer incurable. La dame qui l'hébergeait m'avait dit au téléphone qu'il serait très heureux de me voir et qu'il n'allait vraiment pas bien.

Mon père qui d'habitude avait toujours un beau teint, était pâle et visiblement affaibli. Mais je le regardais en ne cessant de me dire que je le trouvais beau et digne. À ma vue, son visage s'est épanoui. Il s'est assis dans son lit. Il s'est allumé une cigarette, en s'excusant de le faire. C'est un cancer du poumon qui l'avais terrassé.

En peu de temps, il est entré dans le vif du sujet: sa situation, son moral. Puis il a fait tout le bilan de sa vie. Il a parlé de ma mère disant qu'il n'avait jamais aimé quelqu'un autant qu'elle. On aurait dit qu'il voulait que je lui laisse le message. Il a parlé de ses frères, ses soeurs, ses parents, en donnant des détails. Il a parlé de ses joies, ses regrêts, ses rendez-vous manqués. Avec un calme et une sérénité étonnante il m'a dit: Je n'ai pas de problème. Mes valises sont prêtes pour le ciel. J'ai manqué ma vie, mais je ne veux pas manquer ma mort...

Cette rencontre fut très émouvante et très riche en contenu et en émotions. Mon père était calme et serein, malgré tout.

Je suis parti sur la fin de l'après-midi en lui promettant de revenir très bientôt. J'ai tenu parole. Je suis revenu la semaine suivante. Mais mon père était dans un autre monde. La dame qui l'hébergeait m'a dit: C'est drôle, c'est comme s'il vous attendait avant de partir. Il a perdu connaissance très peu de temps après votre départ. Il a été conduit en ambulance et n'a jamais repris connaissance. Il est décédé deux jours plus tard, à l'âge de 61 ans.

Cet été, j'ai reçu des amis de Sherbrooke. La dame du couple était infirmière et nous parlait de son travail qui l'avait amenée à assister des mourrants. Je lui ai demandé si elle avait eu parfois l'impression que certains avaient l'air de survivre presque miraculeusement en attendant de voir quelqu'un avec qui il y avait des choses à régler pour partir en paix. Elle me l'a confirmé avec grande conviction, ajoutant qu'on se demandait parfois où ils pouvaient trouver le moyen de survivre si longtemps avec si peu de ressources. J'en ai été ému.

Je n'aurais jamais cru que le départ de mon père aurait pu m'affecter autant. Ce fut encore plus vrai pour ma mère. À la fin de sa vie, elle avait un verdict d'Alzheimer. Elle le savait et en était très affectée. Elle n'avait plus rien de drôle à vivre. Nous aurions pu voir son départ précipité comme une sorte de délivrance.

Je la voyais tous les jours. Et pourtant après son départ, il y avait tellement de choses que j'aurais aimé avoir pu lui dire.

samedi 3 septembre 2011

Les années ont passé...



C'est fou le nombre de hasards qui ont fait que Laure et moi nous ayons eu la chance de nous rencontrer. Rien ne nous prédestinait à nous retrouver sur la même route.

L'année précédent ma rencontre avec Laure, je croyais que le ciel venait de me tomber sur la tête. Et pourtant, sans cet incident de malheur, je n'aurais jamais rencontré Laure. On se rend souvent compte après coup de l'importance de tel ou tel évènement. Et on dirait que rien n'arrive pour rien.

Ma rencontre avec Laure fut comme une bénédiction du ciel. D'ailleurs, mon père qui adorait Laure disait souvent d'elle qu'elle ressemblait à la sainte Vierge. Aujourd'hui ce genre de comparaison n'a peut-être plus la mêre résonnance, mais à l'époque c'était le compliment suprême. Les choses ont changé...

Lorsque nous nous sommes rencontés, Laure et moi, l'effet fut instantané. Neuf mois après notre première rencontre, nous étions dans l'église pour dire oui à la vie. Nous nous sommes mariés le 4 septembre 1967. Ce sera donc demain notre 44è anniversaire de mariage. Et je dois avouer que la pensée de toutes les années que nous avons partagées m'émeut encore.

Comme je l'ai dit des circonstances fort pénibles m'ont fait dévier de la route que j'avais voulu suivre l'année précédente. Mais si c'était à refaire, j'accepterais volontiers les mêmes détours, même éprouvants, pour me retrouver sur le chemin qui m'a fait connaître Laure.

Il a fallu beaucoup de hasards pour nous retrouver ensembles au même moment au même endroit. Mais ce qui m'impressionne aussi, c'est tout ce qui n'existerait pas si nous ne nous étions pas rencontrés. C'est évidemment le cas de tous les couples, toutes les liaisons. Il suffit d'un petit rien du tout pour changer le cours des événements mettant en cause une foule étonnantes de personnes.

Rien ne me destinait à croiser Laure. Nous demeurions à 150 kilomètres l'un de l'autre. Curieusement, 300 ans avant de rencontrer Laure, nos ancêtres venus de France étaient voisins. Le hasard a voulu que mon ancêtre JeanDalpé dit Parisot et l'ancêtre de Laure, Pierre Désautels soient arrivés en Nouvelle-France, en Amérique du Nord, à la même période. Celui de Laure en1653 et le mien en 1665. Ils étaient tous deux soldats du régiment de Carignan. Et ils étaient beaux-frères, voisins l'un de l'autre.

La vie est remplie de mystères... et elle passe vite. J'ai des photos récentes qui prouvent hors de tout doute que les années ont passé. Sur la photo qui précède, seuls Laure et moi sommes encore de ce monde. J'y pense souvent. Et j'aimerais dire Je t'aime à des êtres chers qui ne sont plus l`a pour m'entendre. Pour terminer dans le bon ton, celui du hasard. En voici un qui ne change rien, mais qui est tout de même amusant:

Nous sommes nés en 1944. Nous sommes mariés depuis 44 ans. Nous nous sommes mariés en 1967 et nous avons 67 ans...
Et nous comptons bien nous rendre jusqu'à notre 67è anniversaire de mariage.

vendredi 12 août 2011

Changer

Tous les vices à la mode passent pour des vertus (Molière)
On a beaucoup parlé de résistances au changement. Il y a eu son pendant: vouloir tout changer même ce qui allait très bien. Pensez au Bloc! Il y a des modes. Il y a même eu une mode contre la mode: des vêtements mal ajustés, des pantalons trop larges, des jeans vendus déchirés au genou ou à l'arrière, des chandails trop courts ne protégeants pas suffisamment le nombril, etc...

On peut s'en amuser un peu. Mais, quand on veut trop se mettre à la mode, se moderniser, le prix culturel et social peut être élevé. Dans les années 60, il y a eu le slogan politique accrocheur "Il faut que ça change!"

Pour une fois, les politiciens ont tenu parole, avec une équipe du tonnerre. Et il a grondé fort, le tonnerre. La révolution tranquille a créé un cadre très stimulant. Mais... on a jeté par dessus bord des pans de notre société que nous aurions dû protéger. Admettons toutefois que ça aurait pu être pire.

Imaginez, le maire de Montréal, Jean Drapeau, avait failli faire détruire tout le vieux Montréal pour y installer des bouches de métros. Il en voyait partout. Au delà de 150. Et tout autour, il imaginait d'immenses tours modernes au centre ville.

Ce projet obtient sans conteste «la palme de l'éradication de l'habitat populaire», affirme l'architecte André Lortie dans son livre Montréal voit grand. Le rêve est pourtant beau: en 1966, on dresse les plans d'une université ouvrière en plein centre-ville. Elle aurait compté 12 pavillons et des résidences d'étudiants sur un campus digne des grandes institutions anglo-saxonnes.

Petit détail: il fallait raser la quasi-totalité du Plateau-Mont-Royal. Carrément. Du parc La Fontaine au boulevard Saint-Laurent, de la rue Rachel à l'avenue des Pins, tout aurait été démoli, au nom de la «rénovation de l'est de Montréal». Le projet est «plus destructeur encore que l'éradication du Faubourg à m'lasse pour Radio-Canada», commente André Lortie.

Il ne verra heureusement pas le jour, remplacé par une version plus modeste animée par les mêmes nobles motifs: l'Université du Québec à Montréal.


Comment expliquer la facilité avec laquelle on envisageait à l'époque la destruction de quartiers entiers? Une idée l'emportait sur tout: le progrès. «À l'époque, tout était permis, on pensait que Montréal aurait 7 millions d'habitants, qu'il fallait détruire les quartiers anciens qui entouraient le quartier des affaires du centre-ville, rappelle Richard Bergeron. Il fallait se préparer à la construction de 150 tours. C'était ça, la vision de Drapeau.»

Les quartiers aujourd'hui branchés, comme le Plateau-Mont-Royal, étaient loin d'avoir autant la cote dans les années 60, rappelle Dinu Bumbaru, directeur des politiques à Héritage Montréal. «Dans beaucoup de quartiers, le tissu social était effectivement affaibli, des quartiers qui étaient devenus des maisons de chambres, presque des quartiers de transition. On était sans mémoire et sans merci, on avait peu de pitié pour ces quartiers.»
Et il y avait une «apathie» de la population, estime-t-il.

Voir Montréal l'a échappé belle!

En 1973, j'ai eu le plaisir de passer 6 mois en France dans le cadre de mon travail. J'avais un projet de recherches sur les ressemblances et les différences sur la façon d'initier les changements d'un côté comme de l'autre de l'Atlantique. Ma plus grande découverte, en France, fut le respect des édifices en place, leur envrionnement. Et c'était aussi vrai au plan de l'architecture que des institutions en général.
À cette époque, la loi d'aide sociale venait d'être réécrite, au Québec, comme si aucune mesure sociale n'avait existé avant. On a tout bâti sur du neuf. En France, on voyait beaucoup de traces de règles mises en place par Napoléon.

Au niveau de l'architecture, leur mise en valeur, l'amour de communiquer les événements historiques s'y rattachant m'ont fortement impressionné. Il me venait vite à l'esprit que nous n'hésitions pas à soumettre des quartiers entiers aux pics des démolisseurs pour tout reprendre à neuf.

Ici, plusieurs édifices charmants d'une valeur inestimable ont été détruits au nom de la modernité.

Ce phénomène n'est pas unique. On a vu souvent un homme décider à lui seul, ou presque, du sort de notre patrimoine. Beaucoup de quartiers entiers de nos plus beaux villages ont complètement été rayés de la carte, à l'autel de la modernité. Ce fut le cas à Havre-Saint-Pierre. On me dit que les Iles-de-la-Madeleine ont connu un courant semblable.

On regardant des anciennes photos de Havre-Saint-Pierre, je me demandais ce qui avait bien pu se passer.
À droite:le couvent;
en allant vers la gauche: l'église et e presbytère.
Tous ces édifices ont disparu.


Y avait-il eu un incendie, une guerre ou même un tremblement de terre? Non. Il y avait eu un curé: le Père Simon Larouche. Il avait du pouvoir. Un curé moderne. Depuis des années les curés avaient ramassé de l'argent à la quête du dimanche, quête qu'ils appelaient la part de Dieu.

On voulait remmplacer l'église en bois, avoir une plus belle maison pour Dieu et avoir plus de places. Pourtant, cette église avait beaucoup de charmes. Elle était de plus le témoin vivant d'une bien belle époque où s'étaient succédées plusieurs génération. Certains habitants de Havre-Saint-Pierre avait le coeur brisé à l'idée de voir disparaître l'église de leurs ancêtres. Mais personne n'aurait osé contredire le curé.

Les premiers habitants de Havre-Saint-Pierre étaient de souche acadienne et venaient des Iles de la Madeleine. Un an et demi après la fondation de leur village, les chefs de familles, au nombre de 23 décidèrent de construire leur première chapelle. C'est impressionnant de voir comment les premiers habitants d'un territoire de Nouvelle France se retroussaient vite les manches pour se donner une chapelle, une église. En janvier 1859, malgré un hiver très froid, ils se mirent à la tâche, coupant le bois nécessaire. Elle fut terminée la même année.

Mais on n'allait pas s'arrêter là. À peine 5 ans plus tard, une souscription permit d'amasser les 3 000$ nécessaires à la construction d'une véritable église où la première grand-messe fut chantée le 5 juin 1867. Pourtant, ces gens là étaient pauvres. Ils avaient cependant du cran et de la débrouillardise.


De nos jours, on détruit des églises parce qu'on manque de fidèles. À cette époque, on en détruisait parce que les églises étaient trop petites.

Au mois de mai 1961, l'église des anciens fut démolie. Avec les années, la fabrique avait accumulée un fond de 125 000$ qui devait servir à la construction d'une nouvelle église. L'argent brûle toujours les doigts de celui qui en accumule, fut-il même un homme de Dieu.

Le 5 mai, le curé Larouche arriva sur le bateau de la compagnie Komo construction de Québec. Il n'y avait pas de route pour se rendre à Havre-Saint-Pierre avant 1974 et les rues ne portaient pas encore de nom. En 1953, il y avait aussi un aéroport situé sur l'emplacement actuel du Centre d'achat, à 10 minutes, à pied, de la mer.

Déjà à cette époque, il fallait se méfier de l'industrie de la construction. Ce n'est pas nouveau. Pour vous mettre dans l'ambiance, vous pouvez voir Véronique Cloutier se moquer de la corruption récente: Voir Bye Bye 2010

Le Père Simon Larouche avait l'argent et le contrat de construction. Mais la compagnie Komo Construction sortit un lapin de son sac: elle chargeait un montant additionnel de 12 000$ pour démolir l'église. Le curé demanda donc avec insistance à tous les paroissiens de participer à une grande corvée de démolition le 6 mai. Il était trop tard pour reculer. Le contrat était signé. Tout le monde devait être présents. Aussitôt la messe terminée on se mit à la tâche.

Voici le récit que l'on trouve dans le programme souvenir du 125 anniversaire de la paroisse à la page 61: Le premier qui arriva à la sacristie fut papa: monsieur Frédéric Jomphe. Je demande à papa de décrocher l'horloge et de l'apporter à la salle paroissiale. Puis arrivaient Paulo Landry, son frère Joseph et quelques autres avec des barres à clous, des haches, des marteaux. Après quelques réflexions, on décida de commencer par les confessionnaux en faisant attention aux vieux péchés qui pouvaient avoir été oubliés àa l'intérieur de ces murs.

Puis de là, les gens arrivaient par groupe avec leurs outils de démolition. Dans peu de temps, 75 étaient arrivés sur les lieux et se mirent en marche par le dehors et le dedans. Des soutanes, des crucifix, des cadres, des chandeliers, enfin tout le bagage d'une sacristie en service depuis près de 100 ans.

Vers 13h30, par groupes de 15 ou 20, il y avait environ 150 gars qui étaient arrivés. Le Père Le Gresley est venu pour sortir le St-Sacrement à travers les bancs cassés et les débris de bois déjà accumulés dans les allées avec un vacarme d'enfer. Il a fallu 11 minutes pour sortir les bancs attachés au plancher. Puis ce fut les fournaises, l'orgue, les cloches...

Vers 6h, l'église avait bien triste mine,il ne restait de sa carcasse que les pièces du carré, la couverture débardoisée et le clocher qui attendait. (...)

Le 15 avrill 1962, dimanche des rameaux, la nouvelle église est ouverte au public pour la semaine sainte.
La nouvelle église de Havre-Saint-Pierre, photo 2010
Je suis souvent incomodé par les fils électriques que l'on dispose n'importe où dans le décor sans se soucier de l'esthétique. C'est ainsi devant l'église de Natashquan et beaucoup d'autres belles pièces historiques que l'on voudrait prendre en photo. Décidément Hydro-Québec n'engage pas de poête pour superviser ses travaux.

Et en 1968, ce fut le tour du presbytère de disparaître. Une autre très belle pièce de notre patrimoine.
Et, environ 35 km au sud, sur l'Ile d'Anticosti, que dire du manoir Menier que les papetières ont brûlé parce que, semble-t-il, trop cher à entretenir et surveiller.


Comme si ce n'était pas assez, c'est toute l'Ile qu'on veut maintenant détruire. On tient les touristes à distance pour exploiter, dans le secret, le gaz de schiste sur un territoire 17 fois l'ile de Montréal.

Quand j'ai acquis ma première maison à Sherbrooke, je l'ai acheté de monsieur Émile Dubois, un sympathique vétéran de la dernière guerre mondiale, pilot d'avion bombardier. Après en avoir pris possession, je lui ai dit que j'étais follement amoureux de la belle petite table en acajou avec des pattes de lion qu'il avait laissé. Surpris, il m'a demandé:
  • Vous aimez ça les vieux meubles comme ça?
  • Oui, beaucoup!
  • Dommage! J'ai un peu honte. J'ai brûlé beaucoup de meubles dans le poêle a bois au sous-sol. Je ne voulais pas vous encombrer avec mes vieilleries.
N'allez surtout pas croire que je suis contre tout changement. Je suis fou des gadgets. Et il y a parfois des changements tellement simples qu'on peut se demander pourquoi on n'y a pas pensé avant. Pour en savoir plus cliquer sur l'auto de demain.

samedi 30 juillet 2011

Le bonheur



Cliquez sur la photo pour mieux apprécier
Laure et Jean-Philippe, en visite sur une ile de l'Archipel Mingan, 2009
Il est bien vrai que nous devons penser au bonheur d'autrui ;
mais on ne dit pas assez que ce que nous pouvons faire de mieux pour ceux qui nous aiment, c'est encore d'être heureux. [Alain]
Extrait des Propos sur le bonheur


Dernièrement, Yves, mon frère aîné, m'a envoyé des photos qui ont été prises à différentes époques. Avec sa caméra numérique, il a reproduit certaines diapositives que j'avais prises. C'est le cas de la photo dans l'en-tête du billet où l'on voit le père Vander Heiden.

J'ai connu à cette époque des situations pratiquement inconcevables de nos jours. Il y a eu, par exemple, ce party où la principale attraction était le Père Vander Heyden. Il aimait être invité dans des partys, animer des discussions. Je n'y ai assisté qu'une seule fois. Mais je m'en souviens encore comme si c'était récent. Il nous avait proposé ce sujet de discussion à débattre entre nous: est-ce que la recherche du bonheur devrait guider toute notre vie, tous nos faits et gestes? Je ne cache pas qu'à cette époque, on disait souvent qu'on devait vivre en fonction du Paradis. Ce n'était pas la vision du Père Vander Heyden.

Elle m'avait fasciné. Selon lui, la recherche du bonheur était toute naturelle et devait nous servir de guide. Il nous l'a présenté comme un code inscrit dans la nature pour nous dire si nous étions dans la bonne voie. Le fait de ne pas nous sentir bien dans notre peau devait nous amener è une forme de réflexion, d'auto-critique, de remises en question. C'est ce que j'ai toujours cru depuis. Je n'ai pas toujours réussi à le vivre. Mais c'est ce que j'ai cherché à faire.

Je crois qu'à l'heure actuelle, nous ne manquons pas d'occasion de remises en question. Et ce, à plusieurs points de vue, plusieurs niveaux, plusieurs routes et plusieurs ponts.

Regardez ce qui rend les gens heureux autour de vous et vous aurez les meilleures leçons de vie. C'est la meilleur façon de savoir ce qui est bien et ce qui ne l'est pas. La semaine dernière, j'ai vu le bonheur. Et il était tout près d'ici, animé par une dame Cassivy dont le père a construit le Bateau de croisière: le Calculot. Voir La tournée des iles inc. Elle dit avoir commencé à travailler comme guide touristique à l'âge de 16 ans, pour le plaisir. Au début, elle ne demandait rien pour le faire. Je crois en l'importance de l'attachement à nos racines pour être heureux. Il faut aimer, respecter et protéger la terre qui nous entoure.

Tournée d'iles de l'Archipel Mingan, juillet 2011
Georges et Annie (frère et soeur de Laure)


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Les monolithes de l'Archipel Mingan ont pris des centaines de millions d'années à se former. C'est la plus grande concentration de monolithes au Canada. Leurs formes sont étonnantes. Le poète Rolland Jomphe de Havre-Saint-Pierre leur a toutes donné un nom. La photo qui précède, c'est la dame de Napiskau. Les hommes voient des fesses, des seins, et une petite tête. Sous les yeux des dames, on voit autres choses.

Cliquez pour mieux voir
Ces monolithes sont faits de roches calcaires. Une compagnie de pétrole, la Dome Petroleum avait fait l'acquisitions des iles en 1979. Elle voulait réduire les monolithes en poudre pour en faire de la chaux. Les habitants de Havre-Saint-Pierre ont été en furie en apprenant la nouvelle. Le bonheur que procurait ces richesses naturelles ne pouvait être menacé sans provoquer de fortes réactions.

Source: Wikipedia
Le bonheur est toujours fragile, comme le monolite sur la photo qui précède. Celui de droite, baptisé Le Pot de Fleur, n'est plus qu'un amoncellement de pierre. Il s'est écroulé un peu comme un viaduc de Montréal.


Heureusement, la plupart sont encore là pour plusieurs dizaines d'années sinon plus, à la condition d'être protégés. La population de Havre-Saint-Pierre a demandé l'aide du gouvernement du Canada pour faire des Iles Mingan un immense parc préservé. Il l'a fait en 1984 et s'est parfaitement acquitté de sa mission de protection de cette nature unique.

Mais lorsque le gouvernement du Canada est devenu propriétaire des iles, un certain René Lévesque fut en furie à son tour.


De nos jours, je dois avouer que le gouvernement du Canada prend davantage soin du territoire du Québec que ne le fait notre propre gouvernement du Québec, du moins sur la Côte-Nord. Allez voir ce qui se passe en Gaspésie, aux Iles de la Madeleine, sur l'Ile d'Anticosti. On a même enlevé le kiosque qui permettait de réserver des séjours à l'Ile d'Anticosti à un taux fort intéressant comprenant l'avion, l'hôtel, des repas gastronomiques et plusieurs taux guidés. Le tout pour 499$. C'est comme si on ne voulait pas que les touristes voient ce qui se passent sur cette ile, le sort que l'on réserve à la terre.

Il n'y a pas de quoi être heureux. Faudrait que j'en parle au Père Vander Heyden...

samedi 25 juin 2011

C'était écrit

Je n'ai rien écrit. Je n'ai fait qu'inscrire.
Claude Léveillée
Fête nationale du Québec 2011 (Caricature: Le Devoir)


Aujourd'hui, le 24 juin, c'est la fête nationale des québécois. Il y a 35 ans, je crois qu'il n'est pas exagéré de dire que ce fut le plus beau party. Le spectacle, intitulé 1 fois 5 avait réuni les 5 plus grands monstres sacrés de l'époque: Vigneault, Ferland, Léveillée, Charlebois, Deschamps. Il ne manquait que Félix Leclerc.
Le spectacle 1 fois 5 demeure quelque chose d'unique: L'album 1 fois 5, paru en 1976, comprend des classiques de Robert Charlebois, Gilles Vigneault, Claude Léveillée, Yvon Deschamps et Jean-Pierre Ferland, interprétés sur le Mont-Royal à l'occasion de la Fête Nationale des Québécois. Jamais une telle frénésie patriotique et tant de talents n'ont été réunis sur une même scène.

Les artistes qui ont participé au spectacle en gardent d'ailleurs un souvenir très émouvant comme en témoigne le lien qui suit: 1 fois 5.

Il est assez émouvant d'entendre le témoignage de Claude Léveillée. Son décès le 9 juin 2011 m'a beaucoup attristé. C'était un idole de mon adolescence. Je me rappelle de cet ami, Jean-Claude Hamel, qui m'en avait parlé la première fois avec passion. Je n'ai pas revu cet ami depuis cette période. Mais je me souviens de ce qu'il m'avait dit de Léveillée.

Le hasard a voulu que je puisse suivre les reportages sur l'événement beaucoup plus que je n'aurais pu le faire normalement. Parti de Sherbrooke, à 8h30, le matin du décès, j'ai emprunté la route 138 pour n'arriver à destination qu'à minuit et demi. Cette route représente pour moi un symbole très fort. Sur une distance de 700 kilomètres, c'est la seule voie terrestre pour se rendre à mon domicile du Havre-Saint-Pierre. C'est un peu à l'image de ma vie. On pense parfois qu'on fait des choix, mais on est conditionné par une foule de petits détails comme si notre chemin avait été tracé d'avance. Avant même notre naissance, nous recevons déjà par hérédité tout un bagage qui va nous influencer, nous faire être et aller dans une direction.

C'est d'ailleurs ce que disait Claude Léveillée dans une entrevue que j'entendais à la radio en roulant sur la 138. Claude Léveillée, c'est tout un phénomène. Il n'a jamais appris à jouer du piano, écrire des notes sur une portée. Il improvisait sur son piano.
Édith Piaf, l'avait remarqué dans un cabaret de Montréal en 1959 et l'avait tout de suite invité à se joindre à elle.

Fascinée par les mélodies qu'il lui avait composées, elle l'avait présenté en grandes pompes aux journalistes français venues à sa rencontre après un spectacle. Il a composé, entre autre Pianos mécaniques et Frédéric, directement à son piano. Voir J'ai la mémoire qui chante.

Claude Léveillée avait dit: Je n'écris pas de chansons, je transcris. Il s'expliquait en ajoutant qu'il avait l'impresseion que tout était déjà dans sa tête, présents comme le résultat de ce qu'il avait vécu, entendu depuis sa naissance. Il avait l'impression d'avoir suivi une route déjà tracée.

Il disait aussi que c'étaient ses angoisses qui le poussaient à écrire. Il a même dit, lors de cette entrevue que nous écoutions ce jour-là: Ceux qui n'ont pas d'angoisses ne m'attirent pas et ce qu'ils ont à dire ne m'intéressent pas. On s'attache aux personnes fortes dont on sent la vulnérabilité. C'était le cas de René Lévesque. Stéphane Laporte, dans La Presse de samedi dernier disait que Claude Léveillée lui avait appris à être triste, mais pas une tristesse négative, une sorte de nostalgie, de bonheur triste que seuls les êtres sensibles peuvent exprimer. Voir Le vieux stéréo de Stéphane Laporte (La Presse)

J'ai été très impressionné par tout ce que j'ai entendu ces jours-là. J'ai été ému de réentendre les meilleures pièces du réportoire de Léveillée. Et le hasard m'a donné un coup de mains.

La route 138 était bloquée à deux endroits impossibles à contourner. Il y a d'abord eu un barrage routier par des autochtones qui protestaient contre le Plan Nord du gouvernement Charest qui vise à contourner des rivières, inonder des centaines de kilomètres pour ériger des barrages électriques. Il y a eu aussi un arrêt de 2 heures, suite à un accident mortel près de Sept-Iles. Encore là, aucun voie de contournement.


Mais il y avait Claude Léveillée et ce qu'on disait de lui pour nous tenir compagnie, Laure et moi.

J'ai aussi suivi, à la télé, les funérailles de Claude Léveillée à l'église Notre-Dame de Montréal. Encore là, j'ai eu des larmes. J'étais ému par les textes bibliques, les hommages. Ce n'est pas toujours qu'on voit partir un géant de cette taille, un artiste de la trempe des Vigneault, Leclerc, Ferland, Deschamps, Charlebois.


Le Journal Le Devoir produit un mot de l'abbé Gravel qui a accompagné Claude Léveillée dans les derniers mois de sa vie. On peut en prendre connaissance en cliquant sur On ne meurt pas, on s'absente.

Je me permets de regretter l'absence de notre premier ministre et son refus d'accorder des funérailles d'état à un citoyen de cette trempe. Une légende vivante. Tout le monde finit par mourir. Mais une légende devrait pouvoir survivre. Sinon, c'est comme un trou dans la 138.


Notre Premier Ministre était absent. Au fond, il y avait mieux. Nanou La Terre y était. Elle nous en glisse un mot dans son commentaire suite à ce billet. Je l'ai trouvé touchant et tellement plein d'humanité. Je vous invite à en prendre connaissance si vous ne l'avez pas déjà fait. C'est dans les grandes circonstances que l'on reconnait ses ami(e)s.

lundi 16 mai 2011

Trouver l'erreur

Si tous les gars du monde
Décidaient d'être copains
Et partageaient un beau matin
Leurs espoirs et leurs chagrins
Si tous les gars du monde
Devenaient de bons copains
Et marchaient la main dans la main
Le bonheur serait pour demain.

Ne parlez pas de différence
Ne dites pas qu'il est trop blond
Ou qu'il est noir comme du charbon
Ni même qu'il n'est pas né en France
Aimez-les n'importe comment
Même si leur gueule doit vos surprendre
Le refrain n'est pas nouveau. J'aimais bien l'écouter lorsque j'étais étudiant. Et j'y croyais. Je pensais même que notre génération allait y contribuer, révolutionner le monde.

Ce qui me frappent particulièrement ces jours-ci, c'est un grand besoin de solidarité qui s'exprime sur plusieurs continents. Plusieurs cris se font entendre un peu partout pour que les frères et soeurs d'un même pays cessent de se confronter selon leurs croyances, leurs idéologies, leurs intérêts personnels. Hier encore, j'entendais hier au bulletin de nouvelles un homme dire: Nous sommes tous des égyptiens, un point, c'est tout!

Si tous les gars du monde
Devenaient de bons copains
Et marchaient la main dans la main
Le bonheur serait pour demain.

Pendant que la Grèce au glorieux passé croule sous les dettes, tout près, sur l'ile de Chypre dont une partie est sous sa juridiction, des compagnies canadiennes font des affaires d'or en exploitant les gisements miniers qui s'y trouvent. Aucun pays ne devrait avoir le droit de vider le sous-sol d'un autre pays. Ce qui s'y trouve, c'est un cadeau de la Nature (appelez-là comme vous voulez) pour assurer le bien-être et le bonheur de ses habitants.

Le sol et le sous-sol ne devraient jamais être cédés à des puissances étrangères sans frontières qu'on appelle multi-nationales.

Si tous les gars du monde
Devenaient de bons copains
Et marchaient la main dans la main
Le bonheur serait pour demain.

Il y a loin de la coupe aux lèvres. Il y a beaucoup de chemin à faire pour en arriver là. Le tunnel est long. On organise plus facilement la confrontation que la solidarité.


Je crois de plus en plus que tous les pays du monde auraient les moyens de permettre à la majorité de ses citoyens de vivre avec décence et dignité.
La planète a de quoi nourrir tous ses habitants. Les solutions sont simples: éviter le gaspillage , favoriser l'économie locale et distribuer équitablement les richesses.

Aux État-Unis, les 12 000 familles les plus aisées touchent chaque année autant d'argent que les 24 millions de ménages les plus pauvres, dénonce l'économiste militant Jeffrey Sachs dans un récent ouvrage.

En France, la classe «supérieure» se porte aussi très bien merci. Selon un nouveau rapport de l'institut national des statistiques (INSEE), les 10% des salariés les mieux rémunérés n'ont jamais autant gagné.
Voir Le fossé se creuse .

Mais rien ne vient tout seul. Il faut des conditions, des moyens. Il faut que chaque pays se donne des représentants pour protéger les intérêts de ceux qui les ont élus. C'est ce qu'on appelle la démocratie: un gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Les vrais exemples sont rares. En principe, on choisit les meilleurs représentants pour voir à nos intérêts. Mais en réalité, c'est pas sûr que ceux qui sont élus soient avant tout préoccupés par nos intérêts. Et on dirait même que c'est de moins en moins vrai.

Il faut aussi un contexte économique favorable. Voilà un autre thème bien à la mode. Au Canada, par exemple, nos politiciens martèlent continuellement ce slogan: L'économie d'abord! Et ils tiennent parole: les aspects humains, l'écologie, l'intérêt général, l'éthique, les droits fondamentaux, tout ça vient en dernier.

Quand on nous parle d'Économie d'abord, si c'était avant tout un moyen d'en faire profiter la collectivité, ce serait bien. Mais rien n'indique que c'est à nous qu'on pense d'abord. J'en ai connu plusieurs politiciens qui avaient cette préoccupation dans le passé, mais ils sont morts ou pas forts.

Aucun chef d'État, même élu, ne devrait gérer les ressources naturelles comme si elles le lui appartenaient en propre, sans même se préoccuper de savoir si il va en rester pour les générations futures. . Aucun chef d'État ne devrait pouvoir changer radicalement le paysage du territoire comme s'il lui appartenait. Avant de détourner des rivières, inonder des centaines de kilomètres carrés, il faudrait bien informer l'ensemble des citoyens de ses intentions et laisser place à des discussions publiques.
Un peu moins de Star Académie, d'Occupation double et de Loft story, un peu plus d'informations sur nos enjeux politiques et sociaux, ça ne ferait pas de tort. Je fais écho ici au dernier billet d'Hala C'est qui elle?.

Encore faudrait-il qu'on s'y intéresse. On le pourrait. La preuve en a été faite. L'émission Tout le monde en parle nous en donne la preuve. Mais on pourrait faire plus et mieux.

Le Plan Nord du Québec illustre bien mon propos. À première vue, ce plan est très emballant et bien emballé. Il est plein de promesses. Il a de quoi faire rêver les plus grands pays du monde. Les chiffres sont gros.
  • Jean Charest fait miroiter des investissements publics et privés de 80 milliards.
  • Le plan Nord va toucher 72 % de la superficie du Québec et on a parlé de 500 000 empois en tout pour une popuation de moins de 2 % de la population du Québec — ou 120 000 âmes — qui habitent ce territoire.
  • C'est avec une pompe toujours plus imposante que le premier ministre Jean Charest a dévoilé de nouveau le Plan Nord, faisant cette fois-ci miroiter des investissements privés et publics de 80 milliards en 25 ans, des revenus pour l'État de 14 milliards.


Deux jour plus tard, alors que les réflecteurs étaient éteints, on a dû corriger l'information. Les retombées seraient plutôt de 120 millions par années. Investir 85 milliars pour récolter 120 millions par année? Trouver l'erreur.
Toutefois, avec les 11 projets d'investissement totalisant 8,2 milliards attendus au Nord, le Québec touchera seulement 120 millions de plus en redevances d'ici cinq ans. Au total, les redevances s'élèveront à 1,4 milliard sur cinq ans, soit un peu moins de 300 millions par année, en moyenne. Même si ce montant devrait croître lorsque les projets atteindront leur pleine production, cette somme semble peu élevée eut égard aux profits.

La plupart des régions minières du monde comme l'Australie, le Chili, le Brésil et le Nevada sont en train de revoir leurs rapports avec l'industrie. Soit en haussant leurs redevances, soit en augmentant leurs participations dans des sociétés d'État hybrides, comme le Brésil l'a fait avec Petrobras.

Les sociétés minières font actuellement des profits faramineux sur des ressources limitées. Dans le contexte, ce sont les gouvernements qui ont le gros bout du bâton, et non l'inverse. Surtout dans les régions qui connaissent la stabilité politique. Affirmer l'inverse, c'est entretenir cette vieille mentalité selon laquelle les Québécois sont des porteurs d'eau.
Voir Sophie Cousineau, La Presse

Le Québec est la province canadienne qui perçoit les redevances les moins avantageuses, 5 fois moins que les autres provinces.

Une nouvelle compilation réalisée par la coalition Québec meilleure mine et son alter ego canadien, MiningWatch Canada, indique que le Québec arrive en queue de peloton des provinces canadiennes pour les redevances versées par les entreprises minières. Ainsi, en 2010, les redevances versées par les entreprises comptent pour seulement 2% de la valeur de la production tirée du sol québécois. Il s'agit d'un des taux les plus bas au Canada. Entre 2002 et 2009, le Québec a reçu 427 millions de dollars en redevances sur une production minière de 37,1 milliards, soit 1,1%, alors que la moyenne canadienne est de 5,1%. Voir La Presse La ministre des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau, a soutenu récemment que le Québec bénéficie du régime de redevances «le plus contraignant au pays».

On dirait parfois que la politique est un jeu où le gagnant est celui qui conte la plus grosse menterie sans rire.

Voir ` Boom minier

Il faut être honnête. Le projet en soi comporte beaucoup d'éléments fort intéressants. Le principal problème vient surtout du fait qu'on ne peut plus faire confiances à nos élus actuels, madame Normandeau en tête. Les compagnies minières sont gourmandes et peu préoccupées par l'économie locale.

Je crois qu'il est temps que la communauté internationale se penche sur la question, se donne des règles et fasse front commun avec les pays qui s'engagent dans cette voie en faisant primer l'intérêt publique des citoyens qu'ils représentent. Concrètment, j'imagine une communauté de pays pour qui choisir ses représentants veut dire quelque chose. Na pas respecter les règles reconnues par le regroupement amènerait des conséquences allant jusqu'à l'exclusion de la communauté économique des États adhérants. Parmi les premières règles, je verrais le respect de propriété du sol et du sous-sol. Aucun pays ne pourrait être envahi par les produits agricoles d'un autre pays s'il peut se suffire à lui-même. Ce n'est pas de dons que l'Afrique a besoin, c'est de protections de son territoire et de ses richesses.

Nous avons pourtant plusieurs beaux exemples de réussite au Québec dont Fermont et Havre-Saint-Pierre où j'habite présentement.
Fermont
Dans ces milieux l'implication sociale et le dynamisme des compagnies minières sont admirables. Paradoxalement, on ne veut pas suivre ces exemples dans l'avenir. Ce n'est pas assez rentable. Ce n'est pas ce qui attire les compagnies, par exemple les compagnies chinoises. Ce sera l'objet de mon prochain billet.

Nous ne sommes pas tous égaux. Les politiciens les plus riches du monde sont
  1. Mouammar Kadhafi: 120 milliards de dollars
  2. Vlamidir Poutine: 40 milliards $(On n'a plus les communistes qu'on avait)
  3. Michael Bloomberg, maire de New York: 18 milliards $.
À noter que mon salaire est confidentiel. Peu d'aliments québécois dans nos assiettes